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Les nuisibles sont et seront affectés par le changement climatique, notamment en termes de répartition et de densité. En parallèle, les changements de la température, les précipitations et les événements météorologiques extrêmes modifieront la lutte antiparasitaire. À quels scénarios pouvons-nous nous attendre ?
Table des matières
En bref :
- Avec une augmentation de température de 2°C, les insectes peuvent connaître 1 à 5 cycles de vie supplémentaires par saison.
- Des étés plus chauds et des températures hivernales plus douces favorisent le développement des moustiques et prolongent la saison des piqures.
- Les populations de mouches pourraient augmenter considérablement, avec des augmentations allant jusqu’à 244% d’ici 2080.
- La température a montré un effet négatif sur les pyréthrinoïdes synthétiques.
- Les méthodes alternatives constituent un choix plus écologique que les entreprises de lutte antiparasitaire pourraient adopter pour atténuer le changement climatique.
Insectes nuisibles et changement climatique
La température est l’un des facteurs qui influencent le plus le comportement, la répartition géographique, le développement, la survie et la reproduction des nuisibles urbains.
Concernant les insectes, l’influence de la température dépasse largement tous les autres facteurs environnementaux. Le Dr Partho Dhang, entomologiste, avait déjà expliqué cela en 2017, lors de la IXe Conférence internationale sur les nuisibles urbains (ICUP). L’expert a de nouveau évoqué les relations entre le changement climatique et la lutte antiparasitaire dans un article. Cet article a été récemment publié dans le magazine PPC de l’Association britannique de lutte antiparasitaire (BPCA).
Les insectes sont des organismes à sang froid. Ils ne peuvent pas réguler leur température corporelle. Celle-ci est donc à peu près la même que celle de leur environnement immédiat. Sur cette base, on estime qu’une augmentation de température de 2°C peut augmenter leurs cycles de reproduction. Ils peuvent ainsi connaître un à cinq cycles de vie supplémentaires par saison.
De plus, des étés plus chauds et des hivers plus doux allongent les périodes d’activité des arthropodes nuisibles (moustiques, termites, tiques, mouches…). Ces changements influencent également leur répartition géographique.
Changement climatique et nuisibles : les prévisions
Le Dr Partho Dhang explique que, d’ici 2080, les populations de mouches domestiques (Musca domestica) et les mouches du genre Calliphora sp. augmenteront jusqu’à 244% par rapport aux niveaux actuels au Royaume-Uni. Ces modèles prédictifs ont été réalisés sur la base des facteurs climatiques. Une chaleur plus longue et des conditions plus chaudes dans les régions historiquement froides aideront à établir des populations de mouches et à étendre leur répartition.
Cependant, les nuisibles qui vivent à l’intérieur, dans des environnements chauffés artificiellement ou à proximité des humains, peuvent ne pas subir les mêmes changements. Ainsi, le changement climatique n’affecte pas toutes les espèces de nuisibles de la même manière.
À cet égard, le Dr Partho Dhang se réfère à des insectes nuisibles probable, peu influencés par les conditions météorologiques : la blatte germanique (Blattella germanica), la punaise de lit (Cimex lectularius), la fourmi pharaon (Monomorium pharaonis), la petite vrillette (Anobium punctatum), la puce du chat (Ctenocephalides felis), le lycte brun (Lyctus brunneus), le capricorne des maisons (Hylotrupes bajulus), la mite des vêtements (Tineola bisselliella), la guêpe des buissons (Dolichovespulaa media) et frelon européen ou frelon (Vespa crabro).
Et certaines espèces augmenteront probablement (en France) avec l’augmentation de la température. C’est le cas de la mouche Tinearia alternata, la fourmi invasive (Lasius neglectus), la chenille processionnaire du chêne (Thaumetopoea processionea), la fourmi argentine (Linepithema humile). C’est également le cas du termite (Reticulitermes grassei), des moustiques Culex pipiens molesus, Culex pipiens pipiens, Aedes vexans, Ochlerotatus cantans. Comme nous l’avons déjà mentionné, la mouche domestique (Musca domestica) est aussi concernée.
Il est possible d’extrapoler ce phénomène à d’autres latitudes.
La température et l’efficacité des insecticides
Dans son article, l’entomologiste parle aussi de l’utilisation des insecticides utilisés pour contrôler les insectes. C’est principalement la matière active qui détermine l’efficacité d’un insecticide. Cependant, diverses propriétés chimiques et physiques des insecticides (stabilité, vaporisation, pénétration et dégradation) dépendent de la température.
Certaines études montrent que l’effet d’un insecticide est plus rapide à des températures plus hautes. Cela concerne les insecticides organochlorés, organophosphorés et les carbamates en général. Néanmoins, des températures plus élevées ont un impact négatif sur les pyréthrinoïdes (synthétiques).
Outre l’impact direct sur l’efficacité des insecticides, la température peut influencer les outils et les méthodologies basés sur leur utilisation. C’est le cas des moustiquaires imprégnées d’insecticide, des traitements insecticides rémanents ou des pièges à appâts avec des attractifs.
Peu d’études ont évalué l’efficacité des insecticides par rapport au changement climatique. Et les facteurs susceptibles d’interférer avec les tendances futures sont divers et complexes. Bien sûr, on ne peut pas faire de généralisations. Cependant, d’après le Dr Dhang, le changement climatique peut affecter de manière significative l’efficacité des insecticides. Les changements de température peuvent avoir une profonde influence sur les nuisibles urbains et donc les stratégies pour les contrôler.
Dans ses conclusions, il indique que le passage aux appâts insecticides, aux barrières physiques, à la prévention contre les nuisibles, aux pièges et aux moniteurs sont des choix écologiques que les entreprises de lutte antiparasitaire pourraient adopter pour atténuer le changement climatique.
Source : PPC